Linda Perron (+19)

Rigaud

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Je roule en voiture vers la maison. J’ai dû faire ce trajet de l’île de Montréal en direction de Vaudreuil-Soulanges au moins 18,000 fois depuis le temps. Je connais bien le territoire, celui qui est le mien depuis 1961. Je suis convaincue que je pourrais littéralement fermer les yeux et décrire le paysage au fur et à mesure que j’avance.

Comme à chaque fois, ce n’est qu’une fois le pont traversé que je me sens enveloppée par le lac des Deux Montagnes. Je sais qu’à ma gauche, pas très loin, se trouve le lac Saint-Louis et droit devant, le lac Saint-François. La rivière des Outaouais est à une vingtaine de kilomètres et c’est celle qui m’accueille à chaque jour depuis quelques années. J’apprécie le côté bucolique de ce dernier tronçon du trajet qui me mènera à la maison.

Aussi loin que je me souvienne, l’eau a toujours été un aimant puissant. Les scientifiques répètent que les rivières et les lacs ont des effets bénéfiques sur les humains qui les fréquentent. Et nous sommes choyés en matière de plans d’eau à Vaudreuil-Soulanges.

J’ai eu la chance de vivre aux abords du lac Saint-Louis. Mon père a eu un coup de cœur pour la région à la fin des années 50 et il a transformé notre petit chalet d’été en un refuge familial où j’y ai vécu heureuse de la naissance à mes 18 ans.

Dans mes souvenirs, je le voyais entretenir vaillamment cette maison et la végétation autour. Je vois encore le bout de son chapeau apparaitre de son immense potager pendant que nous envahissions ses muriers débordants de succulents petits fruits au goût indescriptible après une baignade rafraichissante dans le lac.

J’ai tout aimé de cette vie riveraine, autant l’hiver comme l’été. J’ai eu le bonheur d’avoir comme terrain de jeux un magnifique lac et une forêt généreuse. Je me rappelle encore l’odeur du sapinage, du lac et des feuilles humides. J’ai en mémoire les nombreux privilèges de vivre ici, de la beauté du paysage, la cordialité du voisinage, aux grands espaces et la liberté. Je suis habitée par un grand sentiment d’appartenance.

À ce jour, je vis toujours dans la région. Mes enfants et petits-enfants y vivent également. Je suis encore tout près d’un plan d’eau malgré les aléas de la nature. L’attirance est puissante. J’ai la chance d’avoir comme aire de repos et de bien-être le Mont Rigaud qui abonde d’une faune unique dans la région. Du haut de la cime, on peut apercevoir la majestuosité du territoire. Une simple promenade peut transformer votre état d’esprit. Toute cette beauté est à proximité d’une foule de services et j’apprécie que la région m’offre l’option d’acheter mes œufs frais à la ferme, mes pommes au verger, et mon sirop d’érable à l’une des nombreuses cabanes à sucre, tout en ayant le loisir de jouer au golf, faire mes emplettes et manger dans un des nombreux restaurants.

Je n’aurais voulu vivre ailleurs…